Petites et grosses colères - Catégorie Tranches de Vie
Sais pas ce qu'il y a dans l'air du temps, mais je trouve les gens bien belliqueux, dernièrement. Allez, chausse tes lunettes que je te raconte.
Colère automobile
Il y a quelques jours, je grimpe dans ma limousine et me glisse gentiment dans l'inévitable encombrement matinal, juste au rond
point où se jettent deux voies et une sortie d'autoroute. Les camions et les taxis grillent les feux rouges
[normal, ce sont des "professionnels de la route", ils ont le droit…] Les voitures particulières passent chacune à son tour. Un coup c'est toi, un coup c'est moi, un coup à droite, un coup à gauche.
Tu vois ce que je veux dire, public-chéri-mon-amour.
Je laisse passer une petite voiture rouge et v'là t'y pas qu'une berline bleu foncé force le passage et s'enquille juste derrière, bien agressive.
Genre "Je sais que c'est pas mon tour mais tu me laisses passer et fais pas ch…"
N'ayant pas l'intention de me laisser rouler sur les arpions, j'y vais d'un tut-tut bref mais sonore.
Le conducteur se tourne vers moi [car, oui, quitte à te surprendre, il s'agit d'un monsieur…] l'oeil torve et mauvais, et me fait un doigt d'honneur.
A moi !
Le fou
Je rétorque par le classique appel de phares avec froncement de sourcils et les deux mains levés de part et d'autre du volant. Devine un peu : il me menace du poing ! Voui, tu as bien
lu. Style "Ta g… sinon je descends et je te casse la g…" [je ne le connais pas, mais je subodore la pauvreté de
son vocabulaire]
Là, je fus grandiose !
Sérieux…
Petit sourire amusé avec une nuance d'étonnement, regard calme et assuré, mains sur le haut du volant, je lui fais le geste à la Matrix :
Ah ça lui a fait tout bizarre, au vilain conducteur… Une nénette insensible à ses menaces et qui, de surcroit, ose très imperturbablement jouer sur son terrain.
Héhéhé
Je l'ai doublé quelques mètres plus loin, tête baissé, il s'est abstenu de me regarder.
J'ai dû lui pourrir sa journée
La mienne commençait bien !
Colère au bureau
Tu le sais, je suis l'assistante du maire de G. Je t'épargne les détails mais figure-toi que la directrice du service Courrier a
bien du mal à me supporter. C'est que j'ose retourner les parapheurs émis par son service lorsqu'ils contiennent des
erreurs [mon prédécesseur ne le faisait pas…] ou
les courriers que son service omet d'enregistrer.
Dernièrement, j'ai commis la grossière erreur -à ses yeux- de refuser la livraison du courrier à 17h40 alors qu'il doit l'être vers 16h, sous le fallacieux prétexte qu'il n'y a
officiellement personne dans les bureaux à partir de 17h30 et que je préfère que le courrier soit stocké dans le service idoine plutôt que sur un coin de bureau.
Le lendemain, cette dame envoie un mail incendiaire à mon chef, le maire, en omettant de me mettre en copie. Monsieur le maire m'en informe et me demande d'aller récupérer ledit courrier en
faisant comprendre à cette personne que les problèmes de son service ne doivent pas devenir ceux du Cabinet [c'est vrai,
ça : pas notre faute si plus personne ne veut travailler avec elle]
Je descends donc. J'avance vers le bureau de la dame, qui me voit arriver, se raidit et entame, avant même que je ne dise quoique ce soit, un courroux magistral : toute rouge, elle me crie sa frustration en des termes guère élogieux [pour elle… perso, j'en ai
entendu d'autres] Je reste bien évidemment d'un calme olympien et me permets de lui faire remarquer que c'est à elle de
gérer la distribution du courrier dans les temps [puisque c'était le sujet du jour]
Ouch…
Elle vire au rouge foncé, devient injurieuse [ce que je ne manque pas de lui faire remarquer benoîtement] et
décide qu'elle va régler-ça-tout-de-suite-avec-le-maire, que ça-va-pas-durer-longtemps, qu'elle va pas se laisser faire par une-qu'est-même-pas-fonctionnaire !!!
Tête
baissée, tel un petit taureau furieux, elle fonce sous le regard des ses collègues, suivie par ma pomme marchant droit et portant la grosse pochette du courrier. Pochette que je suis ravie
d'avoir dans les bras lorsqu'elle se retourne brutalement [là j'ai bien cru que j'allais m'en ramasser
une…] Ma sérénité l'a certainement décontenancée.
Elle grimpe l'escalier, traverse le salon d'honneur sous le regard des gars qui installent la déco de Noël, déboule dans
l'éminent couloir du 1er étage et... ... ... tombe sur monsieur le maire qui faisait des photocopies.
Je te laisse imaginer.
Monsieur le maire est un monsieur charmant, serein, aux colères rares et à l'œil clair toujours prêt à pétiller. Qui voit donc surgir une furie connue pour ses colères disproportionnées suivie
d'une MiC au petit sourire désolé aux lèvres, courrier dans les bras.
Héhéhé
Il demande à la virago d'avancer dans son bureau et me lance un regard interrogatif. Je lui réponds que je suis restée calme et
n'ai aucunement été injurieuse… moi.
Pendant que monsieur le maire continue de jouer avec la photocopieuse, la dame, de plus en plus fumasse, s'enquille le couloir en marmonnant, sous l'œil intéressé du personnel du Cabinet. Je la
suis et lui propose, d'un air inquiet, un verre d'eau pour l'aider à se calmer.
Je sais, je sais, ça n'est pas gentil.
Le maire la rejoint, ferme la porte.
Quelques minutes plus tard, elle sort, furieuse.
Je lui tends la pochette du courrier vide avec un sourire très professionnel.
Quand je te dis que je ne suis pas charitable !!!
Je le suis d'autant moins que monsieur le maire m'a proposé le poste d'assistante du nouveau DGS [pour Directeur Général des Services, le poste le plus important après celui du maire] à partir de février [en CDD... paske pas envie de passer fonctionnaire] DGS qui gèrera, entre autres, le service Courrier...Et toujours pas en tant que fonctionnaire !
niark niark niark
=^..^=